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Publié le 23 août 2016

Au Québec, la chasse est une «religion» pour des centaines de milliers d’adeptes

Par André-A. Bellemare

Dans notre province, des centaines de milliers de personnes — femmes et hommes de tous âges et de toutes conditions sociales — attendent impatiemment l’arrivée de septembre et de l’automne pour pratiquer les rites annuels de leur «religion» ancestrale : la chasse! À ce moment-ci de l’année, la majorité des chasseurs ont une idée assez précise de la date à laquelle ils se mettront en quête de leur gibier préféré, ainsi que du territoire qu’ils fréquenteront à cette fin. Encore en 2016, environ un demi-million de chasseurs québécois achèteront l’un ou l’autre des différents permis de chasse vendus par le gouvernement provincial.

En fait, durant les 45 dernières années, bien plus d’un million et demi de Québécois ont été certifiés comme chasseurs par notre gouvernement. Car, depuis le printemps de 1972, les citoyens de chez nous désirant chasser doivent absolument obtenir un certificat du chasseur québécois après avoir suivi des cours obligatoires et subi avec succès des examens imposés par les gouvernements québécois et canadien, s’ils veulent acheter des permis de chasse. C’est surtout le cas de ceux qui souhaitent posséder et utiliser des armes à feu (fusils et carabines, ainsi que certaines armes à air comprimé). Depuis plusieurs années, il faut aussi obligatoirement obtenir un certificat du chasseur spécifique pour chasser à l’arc et/ou à l’arbalète.

Une industrie québécoise d’importance

Des chasseurs qui ont été certifiés durant les 45 dernières années sont décédés ou ont abandonné la pratique de la chasse pour toutes sortes de raisons; d’autres décident aussi de ne pas chasser nécessairement à tous les automnes. Mais environ un demi-million de chasseurs certifiés achètent des permis durant l’année. Ces centaines de milliers de chasseurs vivent avec des personnes qui ne chassent peut-être pas, mais qui partagent le fruit de leur chasse : conjoints, enfants, parents et beaux-parents, amis et collègues de travail. Ce qui fait qu’une portion appréciable des quelque huit millions de citoyens du Québec sont heureux de profiter aussi des saisons de chasse, si ce n’est pas comme adeptes, du moins comme commerçants et travailleurs dans ce domaine ou comme… convives aux festins de gibiers.

Voilà pourquoi les autorités gouvernementales québécoises se réjouissent d’une «industrie» suscitant annuellement des retombées économiques de trois quarts de milliard de dollars. Ces retombées se font surtout ressentir dans des régions éloignées des grands centres urbains, qui ont bien besoin de cet apport d’argent neuf : achat d’équipement pour la chasse, de véhicules adaptés, de vêtements, de forfaits de chasse, de services des employés et des guides (dans les réserves fauniques, dans les pourvoiries, dans les ZEC, etc.), de l’essence, des repas dans les restaurants et de la nourriture dans les supermarchés en région, des frais de traitement des carcasses des gibiers, récoltés, etc.

Une multitude de lois et règlements

Vous pourrez vous tordre de rire la prochaine fois que vous entendrez quelqu’un affirmer que n’importe qui peut chasser n’importe quand et n’importe comment, après avoir acheté une arme à feu aussi facilement qu’un cornet de crème glacée! Les personnes qui tiennent pareil discours parlent à travers leur chapeau d’un sujet qu’elles ne connaissent pas. Ces hurluberlus devraient se bien renseigner avant de lancer leurs ridicules propos. Conseillez donc à ces gens-là de lire, au moins, et d’analyser aussi le résumé des principales règles concernant la chasse que publie le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec : http://mffp.gouv.qc.ca/la-faune/chasse/

Les grandes fédérations du monde québécois de la faune, à l’instigation de la Fédération des pourvoiries, ont décidé de publier un livret de 165 pages pour résumer, sur papier, ces principales règles concernant la chasse dans la province (2,99 $ + taxes). Vous trouverez ce livret dans tous les magasins où l’on vend de l’équipement de chasse et de pêche.

Si vous n’êtes pas chasseur, la lecture des pages de ce «Guide du chasseur» vous permettra de comprendre un peu mieux les lois et les règlements auxquels doivent se soumettre les chasseurs. Si vous êtes chasseur, lisez et relisez cette… bible pour mieux pratiquer votre religion! Cette lecture vous permettra aussi d’en boucher un coin à des personnes de votre entourage qui entretiendraient encore quelques idées farfelues sur la pratique de chasse chez nous.

Des territoires québécois giboyeux

Les chasseurs travaillent avec acharnement toute l’année pour accumuler suffisamment d’argent et de congés afin de prendre le bois, comme on dit chez nous, pour s’éloigner de la jungle urbaine afin de se mettre en quête de différents gros et petits gibiers : orignal, cerf de Virginie ou chevreuil, ours noir, oiseaux migrateurs, gélinottes huppées et tétras du Canada ou les perdrix, lièvres et bien d’autres mammifères et oiseaux.

Les «saisons« de chasse des différents gibiers n’ont pas toutes lieu partout simultanément : il existe des dizaines de zones provinciales de chasse au Québec, et chacune d’elles est dotée de règles particulières, à des dates bien précises, comme vous le savez après avoir consulté le site web du MFFPQ que je vous ai mentionné plus haut.

La chasse, comme vous pouvez maintenant le comprendre, est l’une des activités les plus réglementées et les plus surveillées qui soit. Cela, pour assurer autant la sécurité des chasseurs eux-mêmes que celle du public, ainsi que la perpétuation des espèces d’animaux sauvages. Depuis des décennies, il ne survient pratiquement plus aucun accident durant les saisons de chasse au Québec, lorsque l’activité est pratiquée selon toutes les règles. Pourtant, comme je vous l’ai souligné, des centaines de milliers de chasseurs voyagent avec leurs engins de chasse (fusils et carabines, arcs et arbalètes, armes à air comprimé ou à poudre noire) et tirent des millions et des millions de projectiles chaque année.

La chasse et les chasseurs sont utilisés par les scientifiques de nos gouvernements comme des outils d’aménagement de notre patrimoine faunique, afin que les stocks d’animaux sauvages puissent se développer de façon durable pour le plus grand bénéfice des générations futures, que ces générations-là fassent la récolte ou simplement l’observation de ces animaux.

Durant le dernier siècle, en Amérique du Nord, la protection et l’aménagement des populations d’animaux sauvages ont été tellement rigoureux que nous assistons actuellement à une explosion de certains cheptels. Des scientifiques s’arrachent quelques cheveux devant cette tournure des événements, souhaitant que la récolte des surplus de stocks soit accrue dans le cas de certaines populations d’animaux sauvages à plumes et à poils. Même si le nombre des chasseurs ne cesse de croître, les populations de gibiers sauvages ne diminuent pas pour autant.

Dès la fin du mois d’août…

Ne soyez donc pas surpris si, maintenant ou dans quelques jours, vous apercevez tant de Québécoises et de Québécois de tous âges circuler avec des armes.

Car, dès la fin du mois d’août, les sauvaginiers (chasseurs d’oiseaux migrateurs, de bernaches et d’oies) s’avancent sur les battures du fleuve et d’autres plans d’eau. Au Québec, ces sauvaginiers sont actuellement au nombre de 30 000.

Puis, dès la première semaine de septembre, on assistera à la chasse de l’orignal, le roi des cervidés de nos forêts, dans 14 des réserves fauniques gouvernementales gérées par la Société des établissements de plein air du Québec (SÉPAQ), et dans une portion des quelque 600 pourvoiries agréées par les autorités de la province. Au début d’octobre, ça sera généralement la chasse dans le reste des pourvoiries et dans les 63 zones d’exploitation contrôlée (ZEC-faune).

Tous ces territoires — en plus des territoires dits «libres», qui ne sont pas gérés par des gestionnaires délégués du gouvernement — accueillent ensemble plus de 175 000 chasseurs d’orignal. Cet automne, l’intérêt sera peut-être un tantinet diminué, car c’est une chasse de l’orignal restrictive qui aura cours : c’est-à-dire, comme cela survient aux deux ans, que la récolte des orignaux femelles adultes sera interdite ou restreinte dans plusieurs zones provinciales de chasse. Mais, puisque l’hiver 2015-2016 a été clément ry suivi d’un printemps et d’un été propices à la reproduction et à la survie des grands cervidés dans nos forêts, le cheptel d’orignaux est stabilisé ou en croissance, selon les régions, ce qui devrait attirer la majorité des chasseurs d’orignal habituels. L’automne dernier, lors que l’on a assisté à une saison de chasse permissive, les 175 000 chasseurs de ce gros gibier ont récolté 28 318 bêtes, dont 11 029 femelles, 14 207 mâles adultes et 3082 veaux.

Que ceux qui prétendent que les orignaux «n’ont aucune chance de s’en tirer devant des chasseurs armés de carabines de fort calibre munies de puissants télescopes», retirent leurs propos ridicules : ces gens-là n’ont sans doute jamais pénétré en forêt, et ne savent absolument pas comment se déroule la chasse.

Chevreuil : le gros gibier le plus récolté

De septembre jusqu’à décembre, c’est la chasse du chevreuil dans la fameuse île d’Anticosti, où les chasseurs peuvent rapporter jusqu’à trois cerfs — indistinctement mâles, femelles ou faons — par période de cinq jours. Dans l’île, il est permis d’acheter un permis de chasse spécifique à Anticosti à tous les cinq jours de la saison… si vous disposez des ressources pécuniaires pour acheter autant de forfaits que vous le désirez, et si vous disposez de tout votre temps pour chasser aussi longtemps que vous le souhaitez! Normalement, lorsque l’hiver et le printemps ont été cléments, les chasseurs connaissent un succès moyen de 1,85 chevreuil par séjour hebdomadaire de chasse; ce devrait être le cas durant les prochains mois, après une disette durant les deux derniers automnes succédant à des hivers très durs pour les cerfs de Virginie.

En novembre, quelque 160 000 chasseurs de chevreuil devraient s’enfoncer dans les terrains boisés du sud et de l’ouest du Québec, pas tellement loin des régions habitées, à la recherche de cerfs de Virginie. L’automne dernier, ils en ont récolté 47 620, dont 26 458 bucks. Il n’y a pas si longtemps, ces chasseurs rapportaient à la maison beaucoup plus de cerfs; mais c’était avant que ne surviennent les hivers rigoureux et très neigeux des dernières années, qui ont fauché tant de chevreuils. Dans la plupart des régions du sud-ouest et de l’ouest de la province, les cerfs sont de retour en force pour le bénéfice des chasseurs patients.

Des tas de «perdrix»!

Il fut une époque durant laquelle le nombre d’adeptes de la chasse des

petits gibiers au Québec — surtout des perdrix (gélinottes huppées et tétras du Canada) — atteignait le tiers de million! C’était avant la création des ZEC, qui ont remplacé les anciens clubs privés : progressivement, les ZEC se sont mises à interdire la chasse des petits gibiers durant la saison de chasse de l’orignal, pour ne pas déranger les chasseurs d’orignal… plus rentables pour elles! Les ZEC ont malheureusement été imitées en cela par des très nombreuses pourvoiries. Mais tout indique que le ministère MFFP ramènera les pendules à l’heure dans ce domaine-là.

Les gélinottes huppées sont des millions en Amérique du Nord, surtout au Québec! Nous avions l’habitude, dans notre province, d’en récolter plus de trois millions annuellement, c’est-à-dire entre 50 % et 60 % de toute la récolte de ce gibier à plumes dans tout le continent! Il serait intéressant que les autorités gouvernementales forcent leurs gestionnaires délégués à revenir aux conditions de chasse qui existaient voilà environ trois décennies. Ça serait une occasion formidable de susciter une relève pour les générations actuelles de chasseurs du Québec.

Les ours noirs et les dindons

Les ours noirs fourmillent au Québec. Mais, voilà plusieurs années, ployant sous les pressions des groupuscules d’anti-chasseurs, les politiciens et hauts fonctionnaires avaient presque éliminé les possibilités de chasser cet ursidé au Québec. Ce qui a provoqué une recrudescence d’attaques d’humains par les ours noirs en surnombre, puis un accroissement des dommages aux terres en culture et aux biens des citoyens. Les autorités ont donc progressivement permis de nouveau la chasse printanière de l’ours et, tout récemment, la chasse automnale dans certaines zones. Ce qui a suscité chez les chasseurs un regain de popularité pour la récolte des ours noirs surtout près des localités habitées.

Quant à la chasse du dindon sauvage, qui est pratiquée seulement au printemps chez nous, elle est toute récente. Cette chasse survient à la suite de l’introduction de cet immense oiseau dans certaines régions situées dans le sud et l’ouest du Québec. La chasse du dindon, qui réclame des connaissances bien particulières, n’est autorisée qu’aux chasseurs ayant suivi un cours et un examen spécifiques, car ces derniers doivent obtenir un certificat de chasseur du dindon sauvageafin de pouvoir acheter un permis de chasse pour récolter ce… 747 des oiseaux.

Comme vous pouvez le constater, le jour est bien loin durant lequel des centaines de milliers de Québécoises et de Québécois cesseront de s’adonner à leur religion de la chasse dans nos forêts. Ces chasseurs continueront de respecter les traditions ancestrales millénaires de récolte d’un partie de notre patrimoine faunique, au profit du bien-être et de la réjouissance du reste de leurs concitoyens.

À propos de André-A. Bellemare Chroniqueur de chasse et pêche depuis 40 ans.

André-A. Bellemare participe à Latulippe.com depuis 1996. À ce jour, il a rédigé plus de 400 chroniques pour Latulippe.com Bien informé sur l'actualité du plein air au Québec, il vous offre sa science, son expérience, son vécu et ses opinions.

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